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dimanche 10 janvier 2016

Les rats altruistes, deuxième couche.

(Article initialement publié en 2015)



Et on remet le couvert avec les rats « altruistes » !

Il s’agit de duos de rats : un placé dans un box rempli d’eau et risquant la noyade et un « sauveteur » dans un box au sec, qui doit manipuler un verrou pour ouvrir à son collègue nageur. Un choix est parfois à faire entre des friandises et l’ouverture du verrou.
Bref, une mise en scène de cirque qui aboutit à des résultats « enthousiasmants », comme d’habitude : la majorité des rats sont altruistes !

Cette étude est un quasi copié-collé de celle de Ben-Ami Bartal, Jean Decety et Peggy Mason, citée et commentée dans la même revue en décembre 2011 : http://www.sciencesetavenir.fr/fondamental/20111209.OBS6359/les-rats-liberent-leurs-camarades.html .

Ces deux études permettent surtout de confirmer les capacités cognitives des rats, très largement exploitées par Gunter Sackman pour ses spectacles de cirque : http://www.dailymotion.com/video/xcao1w_spectacle-des-rats-et-ragondins-201_animals .
Par ailleurs, une lecture des ouvrages de Vinciane Despret (« Penser comme un rat » – QUAE 2009 et « Naissance d’une théorie éthologique » -Empêcheurs de penser en rond 1996) permet de porter un regard critique sur ces expériences, qui ressemblent par certains aspects à celle de Robert Rosenthal avec ses rats « idiots » et « intelligents » (en fait, tous les mêmes) confiés à des étudiants : ce sont les manières dont les étudiants manipulaient les rats qui généraient des « intelligents » et des « idiots »…

Et Mme Despret d’écrire « Seuls des expérimentateurs absolument neutres ou indifférents peuvent garantir des rats tout aussi neutres, des rats indifférents à la manière dont ils ont été traités. Ce qui, vous conviendrez, se base sur un présupposé aussi absurde que simpliste – que les rats sont indifférents à l’indifférence. »

Tous les rats de l’expérience étant familiers des scientifiques qui les nourrissent, et certains rats ayant fait l’objet d’un apprentissage pour l’ouverture d’un verrou, personne ne peut assurer que les résultats de l’expérience représentent une découverte ou une avancée dans la connaissance de l’éthologie murine.

Nous lisons d’ailleurs : « Alors, capacité d’apprendre par l’observation ou preuve d’empathie ? Les scientifiques n’excluent aucune piste. ». L’observation des rats sauvages permet sans aucun doute d’éliminer l’empathie.

L’étude de MM. Robitaille, Bovet & Field «  Observations on the social behavior of the Norway rat » (Biol Behav - 1976) montre en effet que la vie des rats sauvages n’a rien à voir avec les Bizounours et le quotidien confortable et doré de leurs cousins de laboratoire qui, rappelons-le, seraient infichus de survivre plus de deux heures dans un égout ou sur une berge de rivière.

Bref, encore une étude qui nous en apprend davantage sur les chercheurs (ceux-là sont « vicieux », donc…) que sur les rats.

Pierre Falgayrac,
Auteur des livres « Des rats et des hommes » (Éditions Hyform 2013) et « Le grand guide de lutte raisonnée contre les nuisibles urbains » (Éditions Lexitis 2014), disponibles ici

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